Le Max Linder, qui est l'une des dernières grandes salles uniques parisiennes, fut construit en 1914 par Max Linder.

Dans l'ancienne version de la salle, on rentrait dans la salle par l'avant droit, au niveau de l'écran. De là, on pouvait choisir entre 800 fauteuils, répartis entre l'orchestre, et le balcon, auquel on accédait par deux escaliers situés à l'intérieur de la salle (un de chaque côté). L'écran mesurait une dizaine de mètres de base. Au début des années quatre-vingts, la salle était vieillissante, et le matériel de projection vétuste.

C'est à ce moment que Jean-Jacques Zilbermann et son équipe entrent en scène. Ceux qui ont repris le Daumesnil pour en faire un cinéma d'art-et-essai, puis l'Escurial pour en faire un mini-Kinopanorama, ont vu grand. Ils reprendront la salle, mais la casseront totalement pour en refaire un cinéma tout neuf. Peu avant l'ouverture, le magazine 7 à Paris organise une projection spéciale d'un film surprise au Grand Rex; les bruits les plus fous circulent sur le titre du film, qui s'avère être une comédie musicale avec Dario Moreno, "Oh Que Mambo!"; malgré la présence du tandem Serrault-Poiret, le film a énormément vieilli; c'est la consternation dans la salle. Avec un ami, nous sortons, et passons devant la porte ouverte du Max Linder. On ne peut résister, on doit rentrer.

A gauche, publicité pour l'ouverture; à droite, programme dans l'Officiel des Spectacles

Le hall d'entrée; sur la photo de droite, on voit à gauche le bar, puis l'entrée de l'orchestre, et l'escalier qui mène aux niveaux supérieurs.

A l'intérieur, alors que des ouvriers s'activent (il est pourtant tard!), un Jean-Jacques Zilbermann qui paraît extrêmement fatigué et stressé nous fait découvrir la salle. Effectivement, tout a changé: le sens de projection est inversé, le faux plafond a disparu pour gagner de la hauteur, un écran géant légèrement courbe a été installé (18m sur 10, soit une image équivalente à celle offerte par un écran de 24 mètres en 1.85), alors qu'un hall et un bar étaient créés à l'arrière de la salle (dans le volume correspondant précédemment à l'avant de la salle). La salle est gris foncé; un peu triste, mais il s'agit de ne pas réfléchir la lumière de l'écran (comme dans les UGC aujourd'hui).

Le public a le choix entre trois niveaux, l'orchestre, la mezzanine (dont les places centrales du premier rang sont les plus prisées de la salle), et le balcon, situé tout en haut de la salle; pour ma part, je trouve la mezzanine trop éloignée de l'écran, et je prendrai l'habitude de m'installer à l'orchestre, où je trouve cependant l'image trop haute. La salle est équipée en THX (rendu populaire par le Forum Horizon un an plus tôt) et en 70mm. Depuis, la salle a été équipée du son Dolby SRD EX et du DTS. La cabine de projection se trouve dans le prolongement de la mezzanine, ce qui permet à ses spectateurs de se trouver au niveau du faisceau de projection.

A gauche, la cabine de projection; à droite, la mezzanine, au fond de laquelle on aperçoit les ouvertures de la cabine.

L'ouverture, prévue le vendredi 27 novembre 1987 pour la sortie du "Dernier Empereur" en 70mm, sera au dernier moment retardée au samedi 28; dommage pour ceux qui travaillaient ce jour-là; ils durent renoncer à leurs espoirs d'acheter le premier ticket, et attendre jusqu'au lundi pour voir le film!... A noter que deux autres salles bénéficieront du 70mm pour ce film, le Forum Horizon et le Kinopanorama, les trois cinémas formant pendant plusieurs années le tiercé gagnant pour les cinéphiles parisiens.

L'écran vu de l'orchestre (gauche) et de la mezzanine (droite).

La programmation est ambitieuse; en version originale, bien sûr, principalement avec des films à grand spectacle (provoquant un premier conflit avec le Grand Rex voisin dès la sortie du Grand Bleu), et des films asiatiques. Le dimanche matin, la salle réunit les "Starfixiens" pour des avant-premières sympathiques, presque hebdomadaires, les mêmes qui avaient lieu précédemment à l'Escurial, et qui allaient permettre à de nombreux cinéphiles de faire connaissance. L'été, on aura d'abord droit à un festival 70mm, puis à un ambitieux "Max Linder fait sa cinémathèque". Au début, alors que les écrans géants parisiens sont encore rares, il y a foule, et le "Max" devient le cinéma branché de la capitale (on peut même réserver sa place par le 3615 Libération!) Puis, petit à petit, le public va s'en détourner.

L'été qui suit son ouverture, le Max Linder organise un festival de rêve pour ceux qui sont restés à Paris...

Un nouvel espoir naîtra avec l'entrée de Kinepolis dans le capital de la salle, qui a bien besoin d'argent frais. Kinepolis annonce l'ouverture dans chaque multiplexe d'une salle qui sera baptisée "Max Linder" qui aura une programmation "haut-de-gamme". Malheureusement, rien ne change, point de nouvelles salles "Max Linder", et le public continue de s'éclaircir, même pour les films porteurs. Alors que la salle pouvait vendre vingt mille billets en une semaine pour "L'ours", il est maintenant rare qu'elle attire plus de trois mille spectateurs en une semaine, dont l'immense majorité s'installent à la Mezzanine (on n'est pas gênés par la foule à l'orchestre). Le Max Linder va mal, d'autant que Kinepolis souhaite se désengager, et son avenir est particulièrement compromis.

A gauche, le Max Linder en 1963; à droite, le même en 2001, "Apocalypse Now Redux" est à l'affiche.
Notez qu'en raison de la surface d'affichage réduite, l'affiche est fortement inclinée.

Remerciements
Merci à l'équipe du Max Linder pour son aimable collaboration.

Crédits photos
La photo noir-et-blanc est extraite d'une publicité.
Autres photos: © Silver Screens 2002

Le Max Linder - 24, boulevard Poissonnière - 75009 Paris